Le temps du désir (2005)

« Quand est désamorcé le besoin d’agir, la production de l’homme devient oeuvre. Au lieu de s’évanouir dans la vanité de son auteur, l’œuvre s’en détache. (…) L’œuvre n’occulte pas l’absence de l’ami ou de Dieu. Elle l’avive. Elle ne met jamais quelque chose là où il n’y a rien. Elle est l’écho du manque-à-être de l’homme. (…) Lorsqu’à travers l’obligation de produire et de travailler, l’homme accède à l’œuvre, il s’en aperçoit au désaisissement qu’il éprouve.[1] »

Denis Vasse

La vie courante indiffère Guay.[2] Pourtant on en apprend sur un rêve, le rêve d’une maison, d’une demeure, là où il aimerait vivre peut-être. La maison revient souvent dans ses journaux comme le lieu où se fait l’écriture. Il a besoin d’un enveloppement quelconque pour se retrouver. La maison est son atelier, ce lieu difficilement localisable, à moitié en dedans, à moitié en dehors.

Il se sent comme « une roche au bord du chemin[3] ». Une roche quelconque, anonyme, une roche qu’on peut faire rouler avec le pied dans sa promenade. La roche est minuscule face au spectacle du monde.

Il se met à l’écoute de ce petit caillou sur la route à suivre. Il écrit lentement.

Cette écoute ne se fait pas sans résistance. Le monde se « durcit[4] » au contact de l’écriture. Il faut y aller par petits traits.

Il n’y a que les discours qui remplissent le vide. Ici, loin des discours, nous sommes en présence d’une parole intimiste.

Dans l’œuvre, le vide inhérent au fait d’être n’est jamais nié. Et c’est en apprenant à vivre avec ce vide que l’autre peut être approché sans être consommé.

La maison est le lieu du désir de l’Autre sans être une institution ou une Église.

Une parole de Vasse me revient encore ici :

« [l’œuvre] est ce point de rupture où la représentation devient signifiante d’autre chose que la chose, cette autre chose qui jamais ne se dit et qui, pourtant, court dans le nœud de toute parole.[5] »

[1] Vasse, Denis, Le temps du désir, essai sur le corps et la parole, Paris : Seuil, 1997, p.54.

[2] Guay, ibid., p.10.

[3] Ibid., p.11.

[4] Ibid.

[5] Vasse, ibid., p.54.

Une réflexion sur “Le temps du désir (2005)

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